Devant un paysage panoramique dans lequel on aperçoit des bâtiments à l’architecture évoquant le gothique flamboyant, un couple se tient face à face : à gauche, une reine blonde, au teint clair, porte une couronne d’argent ; elle est vêtue d’une longue robe bleu clair aux larges parements d’argent et à la doublure rouge, et se tient debout sur une sphère de verre incarnant une lune aqueuse. Dans la main droite, la reine tient un ruban bleu avec cette inscription en or : « Lac Viramium » (lire Lac Virginum : lait virginal). De l’index gauche levé, elle désigne le roi. De la main droite, ouverte et levée également, celui-ci semble engager un dialogue de gestes. Sous une volumineuse cape rouge galonnée d’or et doublée d’un tissu bleu-gris, le roi porte une tunique rouge à garnitures d’or qui descend jusqu’aux genoux. Avec des chausses claires et des souliers rouges, il se tient au milieu d’un feu ardent. Les insignes de son pouvoir sont une couronne d’or posée sur sa tête et un sceptre doré qu’il tient dans sa main gauche et autour duquel serpente un ruban orange où sont inscrits les mots « Coagula Maaschculium » (lire : Coagulum Masculinum : coagulation masculine). Au-dessus des monarques deux figures célestes animées se tiennent dans le ciel nocturne : à droite, un visage rouge du soleil aux longs rayons d’or ondulés, à gauche une figure évoquant la lune, au grand visage d’argent entouré de rayons d’argent également ondulés.
La façon dont est représenté le couple royal évoque les polarités de l’alchimie décrites dans le second traité du Splendor Solis qui précède cette illustration. Outre la femme et l’homme, le peintre a introduit cette polarité dans l’image à travers la dualité eau et feu, ciel et terre ainsi que Lune et Soleil (avec les connotations implicites de l’argent et de l’or, ainsi que du mercure et du soufre). Pour l’alchimie cette union – souvent présentée sous l’aspect de deux amoureux en train de copuler –signifie le chemin vers le dépassement de conditions particulières, imparfaites, et peut renvoyer à l’interpénétration chimique des deux substances arcanes, le soufre et le mercure. Dans le Splendor Solis, le motif du couple royal est basé sur des représentations des manuscrits alchimiques Donum Dei et Rosarium Philosophorum, qui consacrent à ce thème une série de miniatures. Contrairement à ces deux manuscrits qui, comme l’Aurora Consurgens, présentent aussi des illustrations de couples en train de s’unir, le Splendor Solis ne contient que l’image du couple debout, vêtu et couronné : le peintre renonce à la représentation explicite de la sexualité et se contente d’allusions, comme le ventre arrondi de la reine que l’on a cru déceler parfois. Les scènes en grisaille n’indiquent aucune relation directe avec l’image, mais reflètent sa thématique : le combat entre les oppositions et le dépassement dans l’union.
Jörg Völlnagel
(Historien d’art, chercheur aux Staatliche Museen de Berlin)
Devant un paysage panoramique dans lequel on aperçoit des bâtiments à l’architecture évoquant le gothique flamboyant, un couple se tient face à face : à gauche, une reine blonde, au teint clair, porte une couronne d’argent ; elle est vêtue d’une longue robe bleu clair aux larges parements d’argent et à la doublure rouge, et se tient debout sur une sphère de verre incarnant une lune aqueuse. Dans la main droite, la reine tient un ruban bleu avec cette inscription en or : « Lac Viramium » (lire Lac Virginum : lait virginal). De l’index gauche levé, elle désigne le roi. De la main droite, ouverte et levée également, celui-ci semble engager un dialogue de gestes. Sous une volumineuse cape rouge galonnée d’or et doublée d’un tissu bleu-gris, le roi porte une tunique rouge à garnitures d’or qui descend jusqu’aux genoux. Avec des chausses claires et des souliers rouges, il se tient au milieu d’un feu ardent. Les insignes de son pouvoir sont une couronne d’or posée sur sa tête et un sceptre doré qu’il tient dans sa main gauche et autour duquel serpente un ruban orange où sont inscrits les mots « Coagula Maaschculium » (lire : Coagulum Masculinum : coagulation masculine). Au-dessus des monarques deux figures célestes animées se tiennent dans le ciel nocturne : à droite, un visage rouge du soleil aux longs rayons d’or ondulés, à gauche une figure évoquant la lune, au grand visage d’argent entouré de rayons d’argent également ondulés.
La façon dont est représenté le couple royal évoque les polarités de l’alchimie décrites dans le second traité du Splendor Solis qui précède cette illustration. Outre la femme et l’homme, le peintre a introduit cette polarité dans l’image à travers la dualité eau et feu, ciel et terre ainsi que Lune et Soleil (avec les connotations implicites de l’argent et de l’or, ainsi que du mercure et du soufre). Pour l’alchimie cette union – souvent présentée sous l’aspect de deux amoureux en train de copuler –signifie le chemin vers le dépassement de conditions particulières, imparfaites, et peut renvoyer à l’interpénétration chimique des deux substances arcanes, le soufre et le mercure. Dans le Splendor Solis, le motif du couple royal est basé sur des représentations des manuscrits alchimiques Donum Dei et Rosarium Philosophorum, qui consacrent à ce thème une série de miniatures. Contrairement à ces deux manuscrits qui, comme l’Aurora Consurgens, présentent aussi des illustrations de couples en train de s’unir, le Splendor Solis ne contient que l’image du couple debout, vêtu et couronné : le peintre renonce à la représentation explicite de la sexualité et se contente d’allusions, comme le ventre arrondi de la reine que l’on a cru déceler parfois. Les scènes en grisaille n’indiquent aucune relation directe avec l’image, mais reflètent sa thématique : le combat entre les oppositions et le dépassement dans l’union.
Jörg Völlnagel
(Historien d’art, chercheur aux Staatliche Museen de Berlin)