L'Apocalypse en Français

f. 76r, Le Jugement des âmes (Ap. 20, 12b-15)


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Le livre de Vie est ouvert, celui où sont consignés les noms des élus, tandis que les morts sont jugés. Le concepteur du programme iconographique renonce à illustrer de façon littérale la résurrection des cadavres précédant l’anéantissement de la mort et de l’Hadès, bientôt précipités dans l’étang de feu, en faveur d’une image à la fois conceptuelle et programmatique qui concentre l’attention du lecteur sur la dimension messianique de la vision de saint Jean. Ainsi, au registre supérieur, les instruments de la Passion du Christ – la croix avec la couronne d’épines et les clous, la lance et l’éponge – évoquent-ils la gloire du Sauveur avec davantage d’acuité que ne le ferait son effigie triomphale ; et ce n’est pas au pied du Crucifié, mais du livre trônant sur un siège d’apparat recouvert d’une draperie d’autel que sont tombés en proskynèse Marie et le Précurseur Jean-Baptiste, vêtu de sa tunique en peau de bête, comme lors du baptême du Christ (f. 14v). L’un et l’autre sont ici dépeints dans leur rôle d’intercesseurs de l’humanité. Cette figuration du trône de Justice dérivée de l’Hétimasie orientale magnifie le mystère de la Parousie (le second retour du Christ) tout redoublant chez le fidèle la crainte du tribunal céleste.

 
Le registre inférieur offre une vision claire de ce qui attend le défunt dans l’au-delà : l’ange du Seigneur, livre en main, supervise la pesée des âmes effectuée dans une grande balance d’or. Le juste, comparable à l’hostie consacrée dans son ciboire, fait pencher le fléau du bon côté en dépit des efforts grimaçants de diablotins poilus et cornus qui s’accrochent au second plateau et le surchargent de fagots de bois, leur combustible infernal. Mais leur gesticulation n’entame pas la sereine assurance de l’archange Michel qui pointe son index droit vers la croix victorieuse surmontant le ciboire de son aura protectrice.

On peut supposer que Jean a écrit d’abondance ; il se retourne momentanément pour contempler sa plume, tout en maintenant du coude gauche son rouleau de parchemin sur l’écritoire pour l’empêcher de glisser.

Marie-Thérèse Gousset et Marianne Besseyre
Centre de Recherche sur les Manuscrits Enluminés, BnF
(Extrait du volumen de commentaires Apocalypse 1313)


f. 76r, El juicio de las almas (Ap. 20, 12b-15)

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f. 76r, Le Jugement des âmes (Ap. 20, 12b-15)

Le livre de Vie est ouvert, celui où sont consignés les noms des élus, tandis que les morts sont jugés. Le concepteur du programme iconographique renonce à illustrer de façon littérale la résurrection des cadavres précédant l’anéantissement de la mort et de l’Hadès, bientôt précipités dans l’étang de feu, en faveur d’une image à la fois conceptuelle et programmatique qui concentre l’attention du lecteur sur la dimension messianique de la vision de saint Jean. Ainsi, au registre supérieur, les instruments de la Passion du Christ – la croix avec la couronne d’épines et les clous, la lance et l’éponge – évoquent-ils la gloire du Sauveur avec davantage d’acuité que ne le ferait son effigie triomphale ; et ce n’est pas au pied du Crucifié, mais du livre trônant sur un siège d’apparat recouvert d’une draperie d’autel que sont tombés en proskynèse Marie et le Précurseur Jean-Baptiste, vêtu de sa tunique en peau de bête, comme lors du baptême du Christ (f. 14v). L’un et l’autre sont ici dépeints dans leur rôle d’intercesseurs de l’humanité. Cette figuration du trône de Justice dérivée de l’Hétimasie orientale magnifie le mystère de la Parousie (le second retour du Christ) tout redoublant chez le fidèle la crainte du tribunal céleste.

 
Le registre inférieur offre une vision claire de ce qui attend le défunt dans l’au-delà : l’ange du Seigneur, livre en main, supervise la pesée des âmes effectuée dans une grande balance d’or. Le juste, comparable à l’hostie consacrée dans son ciboire, fait pencher le fléau du bon côté en dépit des efforts grimaçants de diablotins poilus et cornus qui s’accrochent au second plateau et le surchargent de fagots de bois, leur combustible infernal. Mais leur gesticulation n’entame pas la sereine assurance de l’archange Michel qui pointe son index droit vers la croix victorieuse surmontant le ciboire de son aura protectrice.

On peut supposer que Jean a écrit d’abondance ; il se retourne momentanément pour contempler sa plume, tout en maintenant du coude gauche son rouleau de parchemin sur l’écritoire pour l’empêcher de glisser.

Marie-Thérèse Gousset et Marianne Besseyre
Centre de Recherche sur les Manuscrits Enluminés, BnF
(Extrait du volumen de commentaires Apocalypse 1313)


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