Le Dieu d'Amours qui, l'arc tendu, [. . .] | Quand j'eus mon sens et ma raison, J'étais si faible que sans doute Mon sang s'écoulait goutte à goutte. Mais non, le trait qui m'a percé Goutte de sang n'avait versé, Et la plaie était toute sèche. Lors, à deux mains, je pris la flèche, Et commençai à la tirer, Et en tirant à soupirer, Et tant tirai qu'enfin l'enture Seule amenai de ma blessure. Mais le dard de fer barbelé, Beauté qu'on avait appelé, Dans mon coeur avec tant de force Était fiché, qu'en vain m'efforce; Toujours le fer dedans restait Et de sang goutte ne sortait. Grands sont mon angoisse et mon trouble Car le péril est ainsi double. |
Roman de la Rose, v. 1749-1766, 1774-1793
(Éd. et trad. de Pierre Marteau)
Le Dieu d'Amours qui, l'arc tendu, [. . .] | Quand j'eus mon sens et ma raison, J'étais si faible que sans doute Mon sang s'écoulait goutte à goutte. Mais non, le trait qui m'a percé Goutte de sang n'avait versé, Et la plaie était toute sèche. Lors, à deux mains, je pris la flèche, Et commençai à la tirer, Et en tirant à soupirer, Et tant tirai qu'enfin l'enture Seule amenai de ma blessure. Mais le dard de fer barbelé, Beauté qu'on avait appelé, Dans mon coeur avec tant de force Était fiché, qu'en vain m'efforce; Toujours le fer dedans restait Et de sang goutte ne sortait. Grands sont mon angoisse et mon trouble Car le péril est ainsi double. |
Roman de la Rose, v. 1749-1766, 1774-1793
(Éd. et trad. de Pierre Marteau)